Pour de nombreux jeunes mineurs migrants isolés, la mer est souvent synonyme d’exil, de peur, d’angoisse et parfois de traumatismes. Certains ont traversé la Méditerranée pour arriver en France dans des conditions dramatiques. Peu d’entre eux apprécient l’eau ou savent nager.
Douze jeunes hébergés à l’Amandier (établissement basé à Cannes) ont eu la chance de participer à une expérience hors du commun qui les a fait sortir de leur zone de confort pour se confronter aux peurs liées à l’eau. En partenariat avec l’association Rose of Jericho, propriétaire du bateau, et soutenu par le Département, ils ont pu embarquer pour 2 jours et une nuit de navigation.
Sur ce très beau trois mats de 18 mètres, les manœuvres sont nombreuses et épuisantes : elles nécessitent l’entraide. Les espaces sont confinés, l’intimité est rare et il faut vite apprendre à respecter les autres. Chacun a sa tâche, elle est accomplie au bénéfice de tous.
À bord, il n’y a plus la hiérarchie sociale qui existait à terre : finis les chefs, les encadrants, les jeunes, il n’y a plus que des équipiers et un skipper. Tout est nouveau et déroutant, il faut écouter, observer, chercher, comprendre et apprendre. Les consignes de sécurité sont strictes, et les erreurs ou les oublis sont vites sanctionnés par la mer ou par le vent.
C’était un réel défi d’affronter la mer pour une première fois pour certains et aussi pour une deuxième fois pour quelques autres… Pour mieux apprivoiser ses peurs, pour exorciser de terribles traumatismes aussi.
Cosette, Emmanuel et Mohammed, ont un fort caractère. Ils n’avaient jamais osé franchir le cap. Mis en confiance et faisant suite à un pari, ils se sont jetés à l’eau pour la première fois après de nombreuses hésitations !
Il y avait aussi ce rare bonheur de naviguer avec les seuls bruits du vent et du clapot, de sentir sur soi la caresse de l’air et le picotement du soleil, et de goûter de manière presque palpable à quelque chose qui s’apparente au sentiment de liberté !
L’expérience est une belle réussite à plusieurs titres. En quelques heures, les relations entre les jeunes et avec les adultes ont complètement changé. Le « vivre ensemble » a pris une nouvelle dimension pour fonctionner en équipe, solidaires les uns des autres, respectueux des règles et conscients de l’importance de la connaissance du milieu dans lequel ils évoluent pour s’affranchir de leurs peurs.
L’expérience va sans doute être renouvelée, d’autres jeunes pourront en profiter.
La vie c’est ça
Un poème de Rouguiatou, Cosette, El Hadji, N’dji, MNK, Moataz, Ayoub, Serhxio, Ahmet, Emmanuel, Lydwin, Christine,
Nelson et La Mama Africa.
Ça commence comme ça sur un bateau
Ça tangue, ça dérive, c’est rigolo
On s’est tous retrouvé en amis
Sur le bateau, on a bien dormi
Au début c’était difficile
D’affronter ma peur de l’eau
J’ai rien lâché ; j’ai gardé le fil
Et en vrai ya plus de bobo
Moi c’est difficile de dire les mots
Tellement c’était chaud et trop beau
Pour moi, c’était une belle sortie
J’étais inquiet, mais j’m’en suis sorti
J’ai mis le gilet pour apprendre à nager
J’ai plongé dans la mer en pensant à ma mère
On a passé de bons moments sur le bateau
On trouve pas les mots, c’était trop beau
Merci à vous, on a eu la chance d’être avec vous
À l’abordage, capitaine des Flots
Souvenirs et rires tout près de l’eau
On a vécu un truc de fou
Ça commence comme ça sur un bateau
Un mot, un oui, un sac et c’est parti
Nous voila, embarqués sur le Rose of
Jéricho
Une vraie dinguerie, ce voilier mon frérot
Apprendre à naviguer, à barrer
À la dérive des sentiments
Rire, nager, mettre les voiles on a kiffé
Être sur mer, sans repères, c’était inespéré
Ça se termine comme ça sur un voilier
Vivre ensemble et partager
Apprendre, comprendre et parler
Ça se passe comme ça à l’Amandier
Cela peut vous intéresser