Ensemble, rénovons la #VillaVictoria
Centre d'hébergement pour les femmes et enfants victimes de violences ღ

Ac.Sé : Les emprises, moyen constitutif de la traite des êtres humains

29 janvier 2025

Les emprises

La question des emprises, en tant que mécanisme central de la traite des êtres humains (TEH), a été au cœur du 42e séminaire annuel du dispositif Ac.Sé (Accueil Sécurisant) organisé par ALC. Cette rencontre, réunissant les partenaires du réseau national Ac.Sé, a permis de poser un regard attentif sur les nouvelles formes d’emprises auxquelles sont confrontées les victimes de la traite.

 

 

 

 

 

 

Christelle Bouali, directrice du pôle Prevention, Hébergement, Insertion (PHI) chez ALC, a ouvert le séminaire en rappelant l’histoire de l’association ALC, pionnière dans la coordination du dispositif Ac.Sé. Elle a souligné l’importance de cette thématique cette année, précisant que « réfléchir sur les emprises nous semblait crucial pour mieux comprendre et accompagner les victimes dans leur parcours de sortie de la traite. »

Céline Olive, chargée de mission du Dispositif Ac.Sé, a partagé son constat sur l’évolution des situations rencontrées dans les services d’accueil partenaires du Dispositif:

Aujourd’hui, nous prenons en charge un nouveau profil, à savoir, des très jeunes femmes, majoritairement françaises, en proie à diverses formes d’emprises, qu’elles soient psychologiques (l’illusion de l’amour avec un soi-disant petit ami) ou chimiques (dépendance à des produits stupéfiants ou médicamenteux). Ces emprises chimiques altèrent souvent leurs capacités cognitives et fonctionnelles au point que leur prise en charge en CHRS (Centres d’Hébergement et de Réinsertion Sociale) n’est pas adaptée. Elles relèveraient plutôt de structures d’hébergement médico-sociales, telles que des ACT (Appartements de Coordination Thérapeutiques). Le développement du partenariat avec de telles structures est l’enjeu principal pour l’année 2025.

 

Christophe Perugini, chef de service, du service spécialisé Les Lucioles et du Dispositif National Ac.Sé, a élargi la réflexion en abordant l’impact des emprises sur toutes les formes de traite, et notamment la contrainte à commettre des délits ainsi que l’exploitation par le travail :

Il est important de noter que les emprises ne touchent pas uniquement les femmes, mais aussi les hommes adultes, souvent victimes de nouvelles filières de traite utilisant des substances chimiques pour soumettre et contraindre leurs victimes. Ces nouvelles pratiques soulignent l’urgence de former les professionnels, tous corps de métiers confondus, pour mieux détecter et accompagner ces cas complexes. Au sein de notre association, nous avons développé une expertise dans le repérage et la prise en charge des victimes, que nous partageons à travers des formations et des échanges avec ces institutions.

 

Durant les ateliers du séminaire et les interventions magistrales, plusieurs méthodes de «déprise» ont été mises en avant. L’accompagnement des victimes nécessite une écoute patiente et vigilante, une coopération étroite entre tous les acteurs, et une grande prudence pour éviter de créer une nouvelle forme d’emprise dans la relation d’aide.

Le séminaire a aussi été marqué par la projection du film « Peut-on sortir de l’emprise ? », un projet réalisé par la vidéaste Coline Dupuis. Ce film donne la parole à quatre femmes protégées par le dispositif national Ac. Sé. Les témoignages poignants de ces femmes, qui parlent de leur expérience de l’emprise et de leur volonté de prévenir d’autres victimes, ont été chaleureusement accueillis. Elles témoignent de leur soutien mutuel, de leur culpabilité et de leur désir de «protéger les autres, avant qu’il ne soit trop tard», et d’aider les professionnels à mieux comprendre leur parcours. « Le film leur a fait du bien », a ajouté Céline Olive, « et elles souhaitent se revoir pour continuer à partager leurs expériences.»

 

Christelle Bouali a également évoqué la reconnaissance croissante de l’expertise d’ALC. L’association a contribué à l’élaboration, et participe à la mise en œuvre et au suivi du troisième plan national de lutte contre la traite des êtres humains 2024-2027, piloté par la MIPROF (Mission Interministérielle pour la Protection des Femmes contre les violences et la lutte contre la traite des êtres humains), dont la secrétaire générale, Madame Roxana Maracineanu, est intervenue au séminaire. « C’est une belle reconnaissance du travail collectif que nous menons », a ajouté la directrice du pôle PHI ALC. « De plus, notre Directrice Générale, Lamia Benkolli-Agius, a été nommée en tant que membre titulaire du comité d’orientation de la MIPROF. Une nouvelle étape dans notre engagement pour lutter contre la traite des êtres humains et défendre les droits des victimes. »